Déconnexion partielle

En vacances, qu’il est bon de changer d’air et d’ambiance. De laisser une partie de son cerveau à la maison et de profiter de l’instant présent. Même si la déconnexion n’est pas totale. D’une part, le fait d’être en vacances me rappelle les quelques jours à la mer l’année dernière. Ma cuisse avait déjà gonflé, pas de douleur mais une plaque dure et chaude, étrange… J’avais eu cinq jours d’antibio et j’attendais que ça disparaisse. Je me revois dire à mon prince : on ne peut pas avoir de cancer à la jambe ?? Il m’avait évidemment répondu que non, presque moqueur car connaissant bien mon côté anxieux permanent et la plupart du temps inutile. J’essayais alors de me rassurer, de ne pas penser au pire mais quand je reconsidère mon ressenti du moment, je savais tout au fond de moi-même qu’il y avait un problème. Je voulais nier cet instinct primaire et inconscient mais je sentais qu’il y avait un PROBLEME. Du coup, j’ai gardé un souvenir particulier de ces vacances ou plutôt de cette intuition inexplicable qui me travaillait alors.

D’autre part, les baignades sont fort agréables mais il y a cette chambre implantable, que je tente de dissimuler ou de montrer volontairement, comme pour expliquer aux gens d’où je viens et justifier ma maigreur, mes bleus et mes poils semi-épilés, mes cheveux hirsutes quand ils sont mouillés. Et puis, j’ai très froid, plus que les autres, alors je porte maillot, gilet, blouson, écharpe et même parfois bonnet le soir alors que les autres sont juste en maillot manches longues voire courtes. Il est vrai que nous ne sommes pas dans le sud mais quand même, je suis en décalage. Parfois, j’aimerais expliquer aux gens que je suis une ancienne malade. C’est étonnant, je me demande comment ils me voient. Une excentrique, une rebelle, une débile, une ancienne cancéreuse. Peu importe me direz-vous. Je ne sais pas moi-même pourquoi je me pose cette question. Je pense qu’il reste en moi de la colère et dans l’interprétation ou pas, j’aimerais dire à certaines personnes qui me regardent bizarrement : allez vous faire voir ! Cela ne sert à rien. Mon cousin m’a dit qu’il ne fallait pas vivre dans la haine, je n’y arrive pas toujours…

Allez, du positif, je fais du vélo, mes cuisses et mes poumons ne me sont pas du tout reconnaissants. Pourtant, il est très plaisant de sentir le vent contre son visage et entendre le bruit des feuilles des arbres au passage. Je fais également une multitude de photos, je ne vois pas de bêtes sauvages mais beaucoup de chats errants, qui posent volontiers espérant obtenir à manger, des petits, des gros, des vilains, des mamans trimbalant leur progéniture dans leur gueule. Heureusement que j’adore les chats et bébé cat est heureux car il peut les caresser.  Lui, il rêve éveillé, ce qui ne l’empêche pas de ne jamais être satisfait. Il joue à n’en plus finir, découvre des choses et des amis ne parlant bien souvent pas sa langue ! Quant à mon prince, il se repose. 

4 commentaires

  1. j’ai enfin pris le temps de tout lire…c’est agéable de decouvrir tes ressentis,j’espère bientôt les lire sur un autre support.
    Lache rien !!!
    bisous de Marseille….

  2. Un long texte, bien écrit, où l’humour est effectivement présent et indispensable dans l’univers imprévisible de la maladie, ici le lymphome. Un long texte, un blog, presqu’un livre, présenté à la face du monde entier (francophone), certes pour être lu et peut-être partagé. Un exercice thérapeutique, comme d’autres malades l’ont fait, du moins ceux qui aiment écrire et qui croient au pouvoir de la parole.

    Vous avez raison de dire qu’il ne faut pas faire de comparaisons entre malades, mais en lisant votre témoignage, je reconnais bien les étapes que j’ai traversées et celles de plusieurs autres.

    La « lionne » n’est pas si agressive que ça ; je vois bien l’anticonformiste et je trouve cela très plaisant. (Moi, j’avais opté pour être hors-combat ou dans la non-violence, mais sûrement pas très « conforme ».)

    Mon lymphome est arrivé dans les années fin 2000 à 2005, et nous sommes en 2018 !

    Votre dernier texte date de juillet-août 2018. Et après, que s’est-il passé ?

    1. Quel touchant et gentil commentaire que voici, la « lionne » vous remercie ! Je suis heureuse de vous savoir guéri, mais l’est-on vraiment un jour dans sa tête ? En ce qui me concerne, je vais de mieux en mieux depuis mon dernier article, la vie et l’envie reprennent leur place petit à petit…
      Bien amicalement Gabriel,
      la lionne

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